Nous publions des prises de position d’organisations du Burkina, sur la situation. Celle de l’ODJ, celle de l’AEBF, celle la coalition syndicale, qui regroupe tous les syndicats du pays, la seconde est celle d’organisations des médias qui dénoncent la suspension du réseau internet décidée par le régime.
LA COALITION SYNDICALE DE LUTTE CONTRE LA BAISSE DU POUVOIR D’ACHAT, POUR LES LIBERTÉS ET LA BONNE GOUVERNANCE
LE COLLECTIF SYNDICAL CGT-B :
SYNTETH – SYNTRAGMIH – FNBPB – SYNAS – Coordination/CNSS – Coordination/SONABEL – Coordination/FSR-B- Coordination ONEA – Comités CGT-B dans les secteurs de l’industrie, du commerce, des banques, du système financier décentralisé, du textile et du transport
L’INTERSYNDICAL DES MAGISTRATS : SAMAB – SBM-SMB
LA COORDINATION DES SYNDICATS DU MINEFID : SATB-SNAID-SYNATRAD-SYNTPC-SYNAFI-SYNASDB-COMITE CGT-B/ENAREF
AUTRES SYNDICATS AUTONOMES : SYNACSAB – SYNADES – APN – SYNAFEB – SYNATRAME – SYNATRACT – SYNTEF – SYNAFER – SYNAJEFP – COPM/B – SYNAGSP – SGB – SYNAG – MONEP – SAMAE – SYNAMUB – SYNAGRH – SYNAGID – SYNIACCB – SYNAPDH – SYNTRAPOST – SY.RE.C.FER.BF – SLCB
Déclaration de la Coalition syndicale sur la situation nationale
La dégradation de la situation sécuritaire au Burkina Faso a atteint un seuil inégalé ces derniers jours avec :
C’est le lieu pour la Coalition syndicale de lutte contre la baisse du pouvoir d’achat, pour les libertés et la bonne gouvernance de condamner avec la dernière énergie ces attaques barbares contre le peuple burkinabè.
Elle voudrait à cette occasion saluer la mémoire des travailleurs, des populations, et des Forces de Défense et de Sécurité (FDS) tombés sous les balles assassines, présenter ses sincères condoléances aux familles éplorées, souhaiter prompt rétablissement aux blessés et témoigner sa solidarité aux personnes déplacées internes.
Les dernières attaques viennent rallonger la liste déjà exorbitante des victimes au sein des populations civiles et des éléments des FDS. Sans être la plus meurtrière, l’attaque d’Inata où tout un détachement de gendarmerie a été affamé durant des semaines, abandonné et livré aux terroristes, révèle tout du sérieux des autorités dans la lutte contre le terrorisme et l’insécurité.
En effet, loin d’être un simple « dysfonctionnement » comme tente de faire croire le Président du Faso Roch Marc Christian Kaboré et son gouvernement tout en se disculpant, ce qui est arrivé à Inata n’est rien d’autre que la conséquence de l’attentisme, de l’amateurisme et du tâtonnement des autorités politiques et militaires dans la lutte contre le terrorisme et l’insécurité qui gagnent, hélas, chaque jour du terrain au Burkina Faso.
Et pourtant, face à l’aggravation continue de la crise sécuritaire il y a déjà quelques années, de nombreuses voix, dont la nôtre, n’ont eu de cesse d’interpeller le gouvernement aussi bien sur sa politique sécuritaire que sur sa gestion de la crise sécuritaire. En réponse à ces justes et légitimes interpellations citoyennes, le gouvernement et des parlementaires ont opposé la répression (cas de la marche de l’Unité d’Action Populaire le 16 septembre 2019), le dénigrement, le mensonge et le silence dans le meilleur des cas.
En rappel, notre coalition syndicale écrivait dans sa déclaration à l’occasion du 1er mai 2020, ceci : « … Ces constats douloureux ne sont que les conséquences d’une gouvernance par approximation et par embuscade, le mensonge d’Etat, le laxisme, la légèreté et le pillage organisé des ressources nationales sous le « nez » de l’Assemblée Nationale qui n’assume presque pas ses fonctions à elle conférées par la Constitution en son article 84 qui exige entre autres le contrôle de l’action gouvernementale. Des acteurs nommés à des postes de responsabilité sécuritaire n’ont su rivaliser qu’en des prises de positions pompeuses et démagogiques du genre : « l’infanterie », « nous allons terroriser les terroristes », « nous irons les cueillir dans leurs trous », etc. Leurs « prouesses » de guerre jusque-là ne se résument qu’à la répression et autres interdictions de manifestations des organisations démocratiques sous de fallacieux prétextes de lutte contre l’insécurité. Même les FDS qui crient leur désarroi face au manque de matériels sur le terrain et leurs conditions de vie difficiles sont martyrisées (cas des policiers radiés et de certains d’eux dont les salaires sont suspendus) ».
Plus d’une année et demi après cette déclaration, la situation sécuritaire est allée de mal en pis au Burkina Faso. La Coalition syndicale constate avec amertume que les agents publics, objets de menaces, sont devenus les cibles privilégiées des terroristes. Ces derniers, sans être inquiétés, font aisément la police sur une bonne partie du territoire national dans le but de traquer voire tuer ces agents de l’Etat.
Incapable d’apporter une réponse adéquate à l’aggravation de la crise sécuritaire, le gouvernement de Roch Marc Christian KABORE s’est plutôt attelé à une restriction des libertés démocratiques et syndicales chèrement acquises au prix du sacrifice de sueur, de larmes et de sang des devanciers. La loi n°044-2019/AN du 21 juin 2019 portant modification de la loi 025-2018/AN du 31 mai 2018 portant code pénal au Burkina Faso en est l’illustration parfaite. Cette restriction des libertés individuelles et collectives a atteint un point culminant ces derniers jours. En effet, avec les interdictions de manifestations, la coupure de la connexion internet mobile dans la nuit du samedi 20 novembre 2021 et l’arrestation de leaders syndicaux, d’organisations de la société civile (OSC) et de webactivistes dont le Trésorier de l’Union régionale de la CGT-B à Kaya, Firmin KABORE et l’officier de police démissionnaire Assimi OUEDRAOGO le 22 novembre 2021 à Ouagadougou, le pouvoir MPP et alliés nous ramènent quasiment dans un Etat d’exception, résolument dictatorial.
Deux jours durant, la coupure de l’Internet mobile pénalisant les populations est restée sans explication. Il a fallu attendre la nuit du lundi 22 novembre 2021 pour qu’un communiqué du gouvernement informe les populations de la « suspension de l’internet mobile pour une durée de quatre-vingt-seize (96) heures à compter du samedi 20 novembre 2021 » tout en brandissant les articles 44 à 46 de la loi N° 061-2008/AN du 28 novembre 2008 portant règlementation générale des réseaux et services de communications électroniques au Burkina Faso qui, à moins d’être atteint d’une myopie juridique, ne donnent aucun pouvoir de suspension de l’Internet mobile au gouvernement. Cette coupure de la connexion internet mobile est inédite dans l’histoire du Burkina Faso en ce sens que même le pouvoir de Blaise COMPAORE n’a pas adopté une telle restriction des libertés et du droit du citoyen à l’information.
Cette interruption de la connexion internet est intervenue au moment où les populations se sont spontanément mobilisées pour barrer la voie à un énorme convoi militaire de l’armée française, ayant quitté la Côte d’Ivoire pour le Niger, et exiger son retrait du territoire burkinabè. De Bobo-Dioulasso à Kaya en passant par Ouagadougou et bien d’autres localités, les populations se sont massivement mobilisées pour exprimer leur rejet de la présence, sur le territoire burkinabè, de troupes étrangères, en l’occurrence l’armée française, dont elles ne perçoivent pas l’apport positif dans la lutte contre le terrorisme. La mobilisation des populations de Kaya a contraint le convoi de l’armée française à se retirer dans le parking d’une société minière situé à quelques kilomètres de la ville au 2e jour de blocage le 20 novembre 2021. Excédés par la détermination des populations de Kaya, les militaires français ont effectué des tirs de sommation pour « éloigner » les populations qui les y ont rejoint. Pendant que l’Agence d’Information du Burkina (AIB) annonce quatre blessés occasionnés par les tirs, les autorités françaises nient le moindre blessé alors que le gouvernement burkinabè reste muet sur la question. Les autorités burkinabè se sont d’ailleurs illustrées en faisant réprimer les manifestants à Ouagadougou dans la nuit du 17 novembre 2021 afin de permettre au convoi de traverser la capitale burkinabè.
Il vous souviendra que le mouvement syndical burkinabè, soucieux de l’indépendance véritable des pays africains, a toujours dénoncé la présence des bases militaires et troupes étrangères au Burkina Faso et en Afrique et exigé le démantèlement de celles-ci. C’est pourquoi, la Coalition syndicale de lutte contre la baisse du pouvoir d’achat, pour les libertés et la bonne gouvernance félicite et encourage tous les manifestants qui se sont dressés contre le convoi de l’impérialisme français sur le territoire national. Elle reste convaincue que l’urgence de la situation sécuritaire nécessite une synergie d’actions à travers une véritable unité d’actions populaires de toutes les organisations sociales représentatives de notre peuple dans toutes ses composantes.
En rappel, « la caractéristique principale de notre coalition, c’est sa détermination à défendre conséquemment les préoccupations du monde du travail et ce en lien avec les problèmes généraux de notre peuple. En témoigne la plate-forme revendicative minimale qui fédère l’énergie des travailleurs dans des actions fortes sur le terrain et libellée comme suit :
C’est pourquoi au regard de tout ce qui précède, la Coalition syndicale de lutte contre la baisse du pouvoir d’achat, pour les libertés et la bonne gouvernance :
En tout état de cause, la Coalition syndicale invite l’ensemble des travailleurs à rester mobilisés et à l’écoute pour tout mot d’ordre que commanderait l’évolution de la situation.
Ouagadougou, le 23 novembre 2021
Pour la Coalition syndicale,
Le Porte-parole
Bassolma BAZIE
Secrétaire Général Confédéral de la CGT-B