Les nouvelles technologies et la recherche au service de la militarisation de la société

Rassemblement pour dire « non à la politique de guerre »
21 septembre 2016
Appel du collectif « non à l’Otan, non à la guerre »
14 février 2017

La controverse qui oppose en ce moment le géant de la Silicon Valley, Apple, au FBI remet sur le devant de la scène l’importance des secteurs des nouvelles technologies et de la recherche de pointe dans la surveillance à grande échelle des citoyens, au sein des dispositifs policiers et militaires des États. Dans cette course au renseignement, l’État étasunien est bien sur souvent, et à juste titre, pointé du doigt. On se souvient des répercussions considérables des révélations d’Edward Snowden qui ont mis à jour l’espionnage à l’échelle mondiale mené par la NSA, qui n’a été possible qu’avec le soutien logistique apporté par les plus grands monopoles mondiaux de l’informatique et de l’Internet, tels Google, Facebook, Microsoft, et même Apple, qui se pose aujourd’hui en défenseur acharné de la vie privée de ses clients.

Dans ce domaine, l’État français n’est pas en reste et dispose depuis les années 70 d’un des réseaux d’écoute et d’interception parmi les plus efficaces et les plus étendus de la planète, mis en place par la DGSE, avec le support des grands opérateurs du secteur des télécommunications. Ainsi, la loi sur le renseignement votée en 2015, quelques mois après les attentats contre Charlie Hebdo et l’Hyper Casher, ne fait que durcir et graver dans la loi des pratiques largement répandues auparavant. Les géants hexagonaux de la téléphonie et d’internet sont sommés de conserver les données des utilisateurs pour une durée maximale de 5 ans et de les mettre à disposition des autorités sur demande. Des algorithmes sophistiqués ont été mis au point au cours de la dernière décennie afin d’analyser ces « métadonnées » à des fins commerciales pour comprendre et anticiper les comportements et les habitudes des consommateurs. Ils permettront désormais de surveiller les citoyens et leurs comportements. En parallèle, l’État investit des dizaines de millions d’euros dans des entreprises telles que Qosmos – déjà pointée du doigt par des organisations de défense des droits de l’homme pour avoir collaboré avec l’appareil de répression des régimes de libyen et syrien – spécialisée dans l’analyse et l’interception du trafic internet (notamment celle des transmissions cryptées).

Que ce soit à des fins de surveillance du citoyen ou pour le secteur militaire à proprement parler, la recherche consacrée aux techniques de cryptage/décryptage de données représentent un enjeu stratégique. L’informatique, la robotique (à commencer par les drones) sont plus que jamais au cœur des nouveaux dispositifs militaires dont les objectifs sont de devenir de plus en plus réactifs dans les situations opérationnelles et de plus en plus indépendants des interventions et des décisions humaines. L’analyse des interventions militaires menées par les grands pays impérialistes au cours des vingt dernières années montre à quel point les progrès dans ces domaines ont été rapides. Il faut noter que même si la collaboration entre les entreprises privées du secteur informatique et l’armée reste forte, les militaires s’intéressent de plus en plus aux solutions logicielles et aux applications dites « open sources » développées en grande partie par la communauté universitaire, qui permettent de s’affranchir des coûts élevés et de l’obsolescence programmée des outils proposés par les grands monopoles du secteur.

Les communications, l’informatique et la robotique, bien que très souvent mentionnées, ne sont pas les seuls secteurs de pointe qui intéressent les militaires. Ainsi, dans un rapport destiné à la Croix-Rouge, des chercheurs britanniques et américains ont insisté sur les utilisations potentielles des recherches en neurobiologie (notamment celles consacrées au traitement des maladies neuro-dégénératives) à des fins militaires. Ces chercheurs ont pointé les potentialités d’utilisation des progrès de la recherche, que ce soit pour le conditionnement des soldats (disparition du stress, de la fatigue ou de la peur) ou pour celui des prisonniers (interrogatoire, torture) à l’aide de traitements chimiques ou, plus généralement, pour le développement de nouvelles armes biochimiques.

Pour finir, notons que – et ceci est vrai au niveau national et européen – une part conséquente des crédits consacrés à la recherche publique est désormais dévolue au thème de « la liberté et sécurité en Europe », promu parmi les « grands défis sociétaux » couvrant, sous des appellations savamment travaillées, certains des aspects évoqués ci-dessus (notamment de la cyber-sécurité). Faire avancer la conscience des travailleurs, chercheurs, de la communauté scientifique sur ces questions et la faire partager à un plus large public s’inscrit dans la lutte contre la mise en place et le renforcement de la politique sécuritaire/militariste de l’impérialisme français, menée par le gouvernement Valls – Hollande.