La soirée du 16 janvier sur la Kanaky à Tours organisée par le Collectif solidarité Kanaky 37 en partenariat avec le CNP, le Cinéma National Populaire, s’est tenue dans un contexte où la Nouvelle Calédonie ne fait plus la une de l’actualité. Nous ne sommes plus au moment de la révolte portée par les jeunes kanak en mai 2024, suite à la réforme d’E. Macron du corps électoral. Cette réforme visait à revenir sur les accords Nouméa/Matignon et rendre minoritaire électoralement le peuple kanak dans cette colonie du Pacifique, à 18000 kms de la métropole.
Le Collectif Solidarité Kanaky 37 encore embryonnaire, constitué avec des militants-es kanak, du PCOF et de la participation active de Peuples Solidaires, souhaitait avec cette soirée faire partager les enjeux autour de la revendication du maintien du corps électoral et apporter un soutien aux prisonniers politiques déportés en France depuis mai 2024. Les Amis du Monde Diplomatique et BDS ont apporté leur soutien et aide aux coorganisateurs de la soirée.
Une exposition dans le hall du cinéma fait par le Collectif retraçait l’historique de la colonisation, avec l’installation du bagne, l’exploitation du nickel, la mise en réserves des kanak, les révoltes qui ont jalonné cette histoire jusqu’aux grands mouvements pour l’Indépendance des années 80 à aujourd’hui.
La soirée a débuté avec le film « Waan Yaat sur une terre de la République française ». Un épisode peu connu qui retrace les massacres de Hienghène qui ont eu lieu le 5 décembre 1984. Le FLNKS avait appelé au boycott des élections à l’Assemblée territoriale basées sur un corps électoral élargi. Dix indépendantistes kanak du FLNKS avaient été exécutés sauvagement au cours d’une embuscade par des petits colons. La justice coloniale a conclu par deux fois à la « légitime défense préventive » et les assassins ont été acquittés. Ce énième déni de justice avait été perçu à juste titre comme une nouvelle manifestation du mépris dans lequel la France tient les peuples colonisés.
Isabelle Merle, Directrice de recherche au CNRS, historienne spécialisée dans l’histoire de la colonisation et plus particulièrement de la Nouvelle Calédonie et la réalisatrice du film Dorothée Tromparent, ayant eu un empêchement de dernière minute, c’est Daniel WEA, président du Mouvement des Kanak de France (MKF), qui a assuré le débat, apportant des informations de premier ordre sur la situation historique et actuelle.
Il a décrit les injustices, l’oppression et la négation d’humanité que vit le peuple kanak depuis 170 ans. Il a insisté sur les revendications de justice et d’indépendance. Pour lui, l’ouverture aux multiples composantes de la Nouvelle Calédonie, ne pourra se faire qu’en reconnaissant la primauté de celle du peuple autochtone. « Il n’est pas possible d’accueillir si l’on n’est pas libre« . Or, le peuple kanak est un peuple ouvert mais sous tutelle. Il a aussi montré concrètement l’importance de la « coutume » dans la culture kanak. Il a fait la coutume de remerciement au CNP et à ceux qui ont organisé la soirée. Il a tenu à expliquer celle du Pardon dont sa famille a été à l’initiative après l’assassinat de Jean-Marie Tjibaou et Yeiweine Yeiweine.
A l’issue de cette soirée très instructive mais aussi très émouvante y compris pour les jeunes kanak présents, le Comité de solidarité avec la Kanaky s’est renforcé d’une dizaine de personnes nouvelles. Des T-shirts faits par une famille de prisonnier politique, représentant des figures historiques de la lutte Kanak étaient en vente. Une collecte était aussi organisée pour venir en aide aux prisonniers politiques déportés.